Pourquoi vous ne voulez pas voir Seconde Chance ?

C'est pas tous les jours qu'une chaîne française lance une série française et qu'en plus, elle croit en elle. Mieux, TF1 aura réussi à la placarder dans pas mal de médias. Du Figaro à Libération en passant par + Clair (l'émission de Canal+), Seconde Chance a profité d'une exposition conséquente. Peut-être aurait-elle mieux fait de s'abstenir.

Rappelons le contexte : Plus Belle La Vie est un immense succès d'audience et flirte avec les 6 millions de spectateurs tous les soirs. Alléchée par cette réussite, France 2 avait lancé au début de l'année Cinq Soeurs, une quotidienne créée par Marathon Production, la boîte coupable de Sous le Soleil. Le résultat, diffusé à 18h20, était médiocre et le public simplement absent. Un premier échec.

L'été dernier, c'était au tour de M6 de tenter l'aventure. Là aussi, ils engagent Marathon Production pour leur fournir Pas de Secrets Entre Nous. A l'image, le résultat est autrement plus convaincant, que ce soit en terme d'interprétation (bien que inégal en fonction des acteurs) que de réalisation. Problème, le scénario était trop plat. Diffusée à 20h05, l'audience ne prendra pas et la série, annulée, sera. Deuxième échec.

Jamais deux sans trois ? TF1 aurait franchement de quoi s'en inquiéter. Le premier épisode de Seconde Chance a été diffusé aujourd'hui et... je l'ai regardé. Malheureusement pour Alma Production, sa série n'a pas vraiment d'éléments supérieurs aux séries de Marathon. Mais commençons déjà par le commencement, c'est-à-dire l'histoire.

On suit les aventures d'Alice Lerois, femme au foyer de 35 ans. Elle n'a jamais travaillé et ça lui convient car elle aime faire le ménage, les courses, la vaisselle et manger des crèmes glacées. La femme parfaite selon Eric Zemmour. Mais, forcément il y a un mais, elle apprend au début de l'épisode que son mari se casse, celui avec qui elle a partagé 15 années de sa vie, jusqu'à se reproduire engendrant deux bambins désormais ados.

Donc elle va devoir se trouver un travail, enchaîner les entretiens puis atterir dans une agence de publicité. Et elle y retrouve une amie d'enfance, devenue directrice générale de l'agence, plutôt rancunière à son égard, mais qui pourtant choisit de l'engager. Justement pour lui faire payer tout un tas de choses qu'elle ne souhaite pas expliciter en fin d'épisode histoire d'apporter un semblant de cliff à ce lancement.

Comment s'en sortent les acteurs ? Pas trop mal. On ne peut pas trop reprocher de choses à l'actrice principale Caroline Veyt mais déjà beaucoup plus à ses enfants, et surtout à la mise en scène. Il suffit de les voir s'approcher d'Alice quand elle vient d'apprendre que son mari la quitte : une scène déjà culte de mauvais goût, un retour aux productions AB.

En terme d'écriture, il y a beaucoup de choses à dire. Bon, ne critiquons pas le choix de faire de l'héroïne la cible parfaite de ce programme : la ménagère proche de 40 ans. Ne critiquons pas non plus la soumission dans laquelle cette femme se complaisait, peut-être va-t-elle se rendre compte qu'elle n'était pas du tout épanouie. Ne critiquons pas non plus les scènes où Alice s'adresse directement à la caméra, la seule nouveauté de la série. Et enfin ne critiquons pas la voix off qui manque singulièrement de naturel pour nous émouvoir.

Car il y a pire, l'écriture. Ceci est la transcription de la scène d'introduction : "Je m'appelle Alice Lerois, j'ai 35 ans, je suis une femme mariée. Alors, pourquoi s'intéresser à moi ? Pourquoi raconter mon histoire ? Oui, j'ai eu mes enfants très jeunes. Oui, j'ai choisi de ne pas travailler pour les élever. Mais ça n'a vraiment rien d'extraordinaire. Je suis très épanouie comme ça. Prévoir les courses, les lessives, les vacances, moi ça ne m'a jamais gêné. Au contraire, les enfants, c'est toute ma vie."

Pendant ces belles phrases, on contemple une Alice heureuse de rentrer chez elle. Forcément, elle vient de faire les courses. Forcément, ses deux ados l'accompagne. Et puis, elle découvre une lettre dans sa cuisine. Et la voix rajoute : "Mais un jour, il y a une lettre qui vous attend. Et là..." A l'image de ce passage, la majorité des interventions de la voix off sont irritants et n'ont rien de léger ni de drôle pour nous amuser. Tout comme Desperate Housewives ou Plus Belle La Vie, la musique est faites de cordes sautillantes qui concluent les scènes.

C'est encore trop tôt pour se prononcer sur les qualités et défauts de la série mais on peut d'ores et déjà faire une remarque : Pas de Secrets Entre Nous avait réussi un petit miracle qui n'est pas prêt de se reproduire. Il reste cependant une chance dans ce format en France. M6 prépare P16, encore une série quotidienne à priori. Celle-ci devrait lorgner du côté des teen drama made in CW. On risque de vous en reparler prochainement.