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La directrice de la fiction d'Arte répond à nos questions




À la rédaction, on est tous très fans de la fiction d'Arte, tant par ses acquisitions de séries européennes de qualité (Borgen ou Forbrydelsen par exemple), là où les autres chaînes ne nous proposent que des mastodontes américains, que par ses créations originales aux sujets toujours très innovants mais aussi très risqués, comme avec Ainsi Soient-Ils récemment, ou Xanadu il y a quelques années.

Alors qu'une nouvelle année débute, nous avons souhaité poser quelques questions à la directrice de la fiction française de la chaîne, Judith Louis, à la fois concernant sa politique d'acquisition de séries étrangères mais aussi sur ses séries originales, dont on vous a déjà parlé récemment. Voici ses réponses...
Spin-Off.fr : Avant d'être en charge de la fiction d'Arte en septembre 2011, vous étiez plus ou moins à ce même poste chez France Télévisions. Quelles ont été les différences entre ces deux postes ?
Judith Louis : Les différences étaient évidentes et de fait quand j'ai accepté le poste. A mon sens, il y avait un défi dans le nombre de soirées et la quantité — sachant qu'on a un budget beaucoup plus restreint, d'environ 25 millions d'Euros pour 20 ou 25 soirées — et dans le fait de pouvoir choisir et de se positionner très clairement en fonction de la masse de projets qu'on recevait, sur ce qu'on voulait mettre en avant et ce qu'on avait envie de défendre, sur comment on avait envie d'avancer. Et en fait, cette apparente contrainte du "beaucoup plus petit" me paraissait pouvoir permettre un défi et un espace éditorial beaucoup plus fort et revendiqué, et j'espère qui permette d'aller au cœur des sujets sans se préoccuper de tous les problèmes que peut avoir France Télévisions, comme toutes les grandes chaines : regrouper une audience majeure, l'ensemble du public, travailler sur tous les genres... J'avais vraiment la possibilité de choisir et de cibler. J'ai également souhaité être dans la continuité de ce qui a été fait depuis plus de 20 ans avec Pierre Chevalier et François Sauvagnargues qui avaient vraiment imprimé une marque d'originalité et de repère d'auteurs.

Que pensez-vous avoir apporté en arrivant chez Arte ?
Je pense que c'est encore beaucoup trop tôt pour le dire. Tout le monde sait que la fiction, ça met un temps fou. On peut dire que j'ai pris la bretelle de l'autoroute et que j'ai continué ce qui était déjà engagé, comme Ainsi Soient-Ils et Odysseus .

Quelles ont été vos priorités ?
Je crois qu'on a voulu entériner et accentuer la politique de séries, tout en restant avec une petite enveloppe budgétaire. Le fait d'avoir obtenu une soirée hebdomadaire, ça nous a permis d'accentuer notre travail sur des séries de 52 minutes, en diversifiant les formats et les projets. On n'a pas souhaité se contenter par exemple de seulement deux séries de 12 épisodes, mais plutôt de séries de 6 épisodes, de mini-séries de 3 épisodes, etc. L'autre point important que l'on a souhaité, c'était de se focaliser sur le contemporain ou la légère anticipation. La science-fiction est difficilement abordable d'un point de vue financier, mais pourquoi pas regarder le monde d'aujourd'hui tout en anticipant ce qu'il pourrait être. C'est pour ça qu'on a lancé une mini-série dans ce genre. D'ailleurs, c'est un peu le style de Real Humans (Äkta Människor) qu'on va bientôt diffuser, qui se passe dans le monde d'aujourd'hui et où les gens acceptent qu'il y ait des robots.

D'ailleurs, la mini-série en développement dont vous parlez, Un Écho,  a été classée numéro 1 par la rédaction de spin-off.fr dans notre article publié récemment.
Oui, j'ai vu ça ! J'ai d'ailleurs été bluffée par votre article, mais sachez bien que ces projets sont en développement et qu'on ne les tournera pas tous. Chez Arte, la validation des projets est assez spéciale, puisqu'ils doivent passer par une conférence des programmes à Strasbourg. Ici, on va tout faire pour qu'il soit validé, mais c'est eux qui auront le dernier mot. Du coup, on reste toujours très prudents concernant la communication sur ce qui est en développement.

Depuis quelques temps, on voit un nombre important de séries d'Europe du nord sur votre antenne, avec Forbrydelsen et Borgen mais aussi Äkta Människor et Lilyhammer qui vont bientôt arriver...
Les acquisitions sont menées à la fois par Arte France et Arte G.E.I.E, et notre volonté est de proposer le meilleur de la fiction européenne. On a fait quand même des petites incartades avec l'Australie et The Slap ainsi qu'Israël et Hatufim, et on s'interdit pas de continuer à en faire ! Mais avant tout, Arte est une chaîne européenne et la création européenne est en ce moment assez incroyable. Si on pouvait faire entrer en répercussion la production française avec ce qui se fait en Europe et qui est assez étonnant, ça serait un pari réussi. Du coup, ça nous met un sacré défi pour la production française. En tout cas, je me mets la pression et je mets la pression aux autres pour y arriver ! Mais quand on voit Real Humans ou les fictions britanniques, dont je suis très fan, je me dis que c'est pas possible qu'on y arrive pas.
 
Odysseus, qui est une coproduction européenne, va peut-être être un déclencheur pour les autres pays pour coproduire plus de projets avec la France...
Oui, et donner des envies, absolument. De toute manière, on a un ADN assez commun avec l'Angleterre, la Scandinavie... Ça serait vraiment intéressant d'avoir des projets qui permettent de rapprocher tous ces intervenants.

C'est déjà un peu le cas avec Babylon, également en développement...
Absolument, c'est une série en co-développement avec la chaine DR au Danemark.

D'ailleurs, ce projet a été lancé il y a plusieurs années déjà. Où en est-il ?
En effet, le projet a connu plusieurs changements : le producteur danois (ndlr : Zentropa puis Eyeworks) ainsi que l'équipe d'écriture. Mais le projet est toujours en cours et il s'agit toujours d'un thriller en liaison avec le Parlement européen.

Concernant Hatufim, l'acquisition de la série par Arte s'est faite assez tardivement. Est-ce le succès de Homeland, qui est basé sur la série israélienne, qui vous a décidé à en faire l'acquisition ?
Non, le délai était plutôt à cause du calendrier administratif et budgétaire. Par contre, je suivais depuis un moment la fiction israélienne, que je trouve extrêmement créative et inventive et qui travaille en toute connaissance de cause. J'ai eu envie qu'on s'en serve en quelque sorte comme modèle pour Arte, mais tout en ayant conscience qu'on a des contraintes budgétaires. Du coup, j'ai regardé plusieurs de leurs séries, et concernant Hatufim, j'en avais vu un peu il y a quelques temps et j'ai pu terminer la première saison à Séries Mania l'année dernière. Mais paradoxalement, le succès d'Homeland a plutôt été un frein, parce que tout le monde pensait qu'on connaîtrait déjà l'histoire. Or, oui, c'est basé sur la même histoire, mais la série n'a rien à voir. C'est beaucoup plus axé sur la famille, sur comment on se reconstruit, comment on réintègre sa vie après 17 ans, ce que sont devenus les autres. Il y a trois personnages au lieu d'un, c'est vraiment autre chose. Du coup, je suis plutôt contente si vous me dites que le succès d'Homeland peut-être un plus pour Hatufim. A un certain moment, c'était un frein. Donc, c'est plutôt chouette !

Concernant Ainsi Soient-Ils, vous avez pris un risque en évoquant le sujet de la religion, mais qui a payé au final. Pensiez-vous que la série aurait eu un tel succès ?
On s'attendait pas à un tel succès aux niveaux des audiences, c'est certain. Après, je trouve que c'était un défi incroyable de la part de François Sauvagnargues de lancer une série sur un sujet pareil. Pour le coup, là, le défi a été relevé. Quand je suis arrivée, la série était en tournage et quand je l'ai découverte au moment du montage, j'ai été impressionnée. Bien évidemment le projet a été soutenu par toute la chaîne, mais on s'attendait absolument pas à un tel succès d'audience. Ça nous a vraiment porté et encouragé pour la suite.

En même temps, elle a déclenché une polémique au sein de l'église en France. Vous attendiez-vous à ce genre de réaction ?
Là, on peut dire qu'on s'y attendait ! Ce qui était très intéressant, c'est que la polémique continuait au sein même de l'église catholique. On sentait que les "progressistes" défendaient la série en disant que c'est vraiment comme ça que ça se passe, alors qu'une frange un peu plus traditionaliste s'est enflammée.

La saison 2 est en développement, est-ce que le tournage commence bientôt ? La série sera-t-elle de retour en fin d'année ?
Oui, le tournage commence au printemps mais pour une diffusion plutôt début 2014.

Le prochain gros événement de la chaine est Odysseus, une co-production européenne sur l'Odyssée d'Homère mais du point de vue des gens qui vivent à Ithaque.
Oui, on est actuellement en post-production et en mixage. Elle devrait arriver à la fin du semestre.

Là aussi, une fresque historique, c'est assez rare à la télévision française. Il faut souvent des moyens financiers importants pour ne pas faire cheap, or, je suppose que le budget est bien inférieur à celui de Rome, par exemple. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Je vous encouragerai à discuter de ça avec les producteurs, mais ce genre de projet ne peut se faire que lorsque qu'il y a un partenariat entre Arte et une coproduction internationale, ou ici, européenne. Après, même s'il y a des scènes de batailles, l'idée a été de travailler un peu plus sur l'intime. C'était un vrai pari au niveau de l'écriture et de la réalisation. Mais ça reste quand même une grande saga.

Est-ce que le projet a été conçu comme une "mini-série de 12 épisodes" ou il pourra y avoir une suite ?
Il n'y aura pas d'autres saisons. Vous verrez pourquoi ! C'est une histoire bouclée.

Parmi les projets en développement, certains arriveront-ils à l'écran en 2013 ?
On a un projet qui va se tourner à partir de début avril, il s'agit de Paris, écrit par Virginie Brac et réalisé par Gilles Bannier. On vient d'entrer en préparation. Après, je pense que certains 3x52' vont entrer en tournage, mais je sais pas encore lesquels, puisqu'ils ne sont pas passés par la conférence de Strasbourg.

Enfin, est-ce que vous serez présents au Festival Séries Mania aussi cette année ?

Oui. Absolument.

Pour présenter Odysseus ?
Tout à fait.

Propos recueillis par Thibault Romieu.


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INFORMATIONS
Date : 13/01/2013 à 14:50
Auteur :
Tags : arte fiction interview judith louis ainsi soient-ils odysseus hatufim real humans borgen
Chaine : Arte
Catégorie : Interview
Sous-Catégorie : Producteur


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