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Boss. A Starz born



Toutes les chaînes câblées qui ont marqué l’histoire, l’ont fait grâce à une grande série. HBO a fait The Sopranos, Showtime Dexter, AMC Breaking Bad...

Ce n’est qu’en 2005 que Starz (chaîne du câble à péage comparable à HBO, Showtime ou Cinemax et reçue par 22 millions de foyers) se lance dans la création de séries originales avec un succès assez relatif. Mais peut être que l’histoire est en train de changer avec Boss (1), une série qui parle de politique (décidément tendance avec le porno !) où le héros, à la tête d’une des villes les plus puissantes des Etats-Unis, Chicago, voit son avenir compromis par une maladie dégénérescente.

Un personnage aux références multiples


Interprété par Kelsey Grammer, récemment couronné d’un Golden Globe, le personnage de Thomas Kane semble familier… Dans un premier temps, il rappelle Richard Joseph Daley, maire de Chicago de 1955 à 1976 et connu pour avoir régné d’une main de fer sur la ville.
On pense à son homonyme Charles Foster Kane, le magnat de la presse de Citizen Kane, personnage tout puissant et énigmatique dont le simple mot « Rosebud » éveille la conscience d’un journaliste qui croit découvrir à travers ce mot la porte d’entrée vers un mystère que Kane aurait gardé enfoui toute sa vie. Mais ici, Thomas Kane n’est pas encore mort et l’heure n’est pas à l’écriture d’une bio pour la rubrique nécrologique.

Du côté série, c’est l’image du mafieux Tony Soprano qui vient à l’esprit. Tous deux portent un secret qu’ils ne peuvent dévoiler sous peine de ne plus représenter la figure forte qu’ils incarnent et de voir s’effriter l’empire érigé. La peur et l’anxiété que ce secret soit découvert pousse parfois Kane aux limites de la paranoïa : menace sur son médecin, achat de ses médicaments à des dealers, installation de caméras dans son bureau pour surveiller ses crises.
Plus récemment, le « Boss » de Chicago nous rappelle Walter White, héros de la série Breaking Bad. Comme lui il est très vite confronté à l’inéluctabilité d’une mort qui se rapproche à grand pas. Si Walter, terrifié à l’idée de ne rien laisser après sa mort, décide d’utiliser ses connaissances en chimie pour fabriquer des méthamphétamines et gagner assez d’argent pour mettre sa famille à l’abri du besoin, Thomas Kane lui est terrifié à l’idée de perdre sa position. Il est pris dans un engrenage, celui du pouvoir qu’il ne peut quitter car complètement dépendant et dont Walter Whiter va en faire les frais. Porté par son nouveau statut, Walter se découvre capable de cynisme et de cran. Il devient un caïd et prend du plaisir à cela. Thomas Kane choisit donc le silence et les pires compromissions pour conserver l’objet de tous les sacrifices de sa vie. Kane n’est pas plus le miroir de Walter White que sa projection future, l’homme qu’il pourrait devenir s'il continuait sa progression dans le milieu de la drogue.

Pourtant même si les références sont fortes, Thomas Kane ne passe pas inaperçu. Avec ses costumes sur mesure et son allure de bulldog prêt à tout moment à monter sur le ring pour se battre, Kane impose par sa présence. Les dialogues écrits avec précision en font un homme d’une éloquence redoutable. Et même si l’on éprouve de l’empathie pour cet homme malade, il reste prêt aux pires compromissions pour obtenir ce qu’il souhaite.

Au delà de la politique, une tragédie shakespearienne

Pour interpréter Thomas Kane, le choix s’est tourné vers Kelsey Grammer surtout connu pour le personnage de Frasier Crane dans la série Cheers - sitcom diffusée sur NBC de 1982 à 1993 - et Frasier – spin off de la précédente et diffusée de 1993 à 2004. Très populaire aux USA gràce à ce personnage, il s’est aussi distingué au théâtre à ses débuts, en se spécialisant dans les œuvres shakespiriennes. Un aspect de son jeu qui a du intéresser de près le créateur de la série puisque Boss relève de la tragédie et reprend plusieurs éléments du Roi Lear de William Shakespeare.
L’élément le plus marquant est sans doute la dérive vers la folie du Roi Lear et de Thomas Kane. On retrouve aussi dans le personnage d’Emma Kane (Hannah Ware) la représentation de Cordélia dans la pièce. Abandonnée par ses parents, elle incarne le personnage le plus moral de la série en étant bénévole dans un dispensaire du ghetto et prêtre. Pour Thomas Kane, c’est d’ailleurs la seule personne de confiance vers qui il se tourne lorsqu’il apprend sa maladie. Elle ne fait pas partie du milieu à l’inverse de sa femme avec qui il n’entretient plus qu'une relation de façade.

On retrouve ainsi la thématique des alliances et du complot qui mènent à la trahison mue par la seule volonté d’assurer des privilèges. Les gens se succèdent au bureau de Thomas Kane et les doléances sont nombreuses mais jamais gratuites. Le pouvoir est la seule chose que les visiteurs du « Boss » respectent et n’hésiteraient pas à se retourner contre lui si il n’était plus en position dominante. Ainsi la confiance est une règle qu’il est dure de respecter et la vengeance lorsqu’elle est possible se fait impartiale. Tout cela mis ensemble en fait une série extrêmement brutale, d’autant plus que l’environnement politique dans lequel la série s’inscrit est un terreau merveilleusement fertile. Un univers noir qui ne vous laissera pas insensible !



Mais si Boss s’inscrit dans un univers politique entre élection primaire et gestion de crises médiatiques, environementales, sanitaires… ce n’est que pour mieux traiter l’enfermement et la solitude du personnage principal. En tant que maire, Thomas Kane ne peut faire confiance à personne car tous voient en lui le pouvoir qu’il incarne. Cet environnement politique n’est là que pour stigmatiser les tensions entre les personnages, mettre en conflit les jeux de pouvoir. Lorsqu’il apprend sa maladie, il comprend qu’en plus de ne pas pouvoir se fier à son entourage, il ne va bientôt plus être capable de faire confiance à son propre jugement. Comment agir lorsqu’on ne peut même plus compter sur soi même? Voilà l’enjeu de la série.

La chaise vide du premier plan du pilote est peut être en cela annonciatrice. Plongée dans une semi obscurité, une voix sans visage lui annonce la terrible nouvelle, comme s’il était convoqué au purgatoire et jugé pour ses péchés. une voix divine qui résonne dans la tête de Kane complètement assommé par l’annonce.
Visuellement, la photographie est absolument magnifique. Le travail de l’image n’est jamais superficiel, il participe à l’univers du récit, en permet une meilleure caractérisation. Je regrette qu’il n’en soit ainsi en France que sur les séries Canal+. L’originalité de Boss tient à l’utilisation régulière de cadrages serrés voir très serrés qui nous rapprochent de manière excessive des personnages afin d’en capter la colère, la peur, l’angoisse… autant d’émotions qui retiennent notre attention et nous implique dans les séquences.

Produite par Gus Van Sant dont il a réalisé le pilote (un des meilleurs pilotes de l’année !), la série de 8 épisodes n’a malheureusement pas été achetée par Canal +. Un regret car si cette série n’a pas été un succès d’audience, elle a reçu un bon accueil critique et une saison 2 est déjà en préparation. Alors qui sait, peut être que Canal + sera plus attentif l’année prochaine !

Avant de vous laisser, je tiens à préciser que la musique du générique est signée Robert Plant, un titre qui n’a pas été choisi au hasard… « Satan, your Kingdom must come down »

Samuel Bilboulian


(1) Pour rappel, la série Boss s'est imposée en première place des 50 séries les mieux notées en 2011, avec 14,8/20 de moyenne


    11 personnes aiment : Lawlilol, nicoalz, Flavio ~, Tyra, Boulbi, ...  


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INFORMATIONS
Date : 18/02/2012 à 00:29
Auteur :
Tags : boss starz kelsey grammer critique
Fiche série : Boss

Catégorie : Spin-Off
Sous-Catégorie : Tribune



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