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Borgen, la politique à l'état brut



Après Forbrydelsen (diffusée sous le nom The Killing en France), Millenium, et avant The Bridge (coproduction dano-suédoise présentée au FIPA il y a quelques jours), la nouvelle série venue du froid se nomme Borgen, soit "Le Château", d’après le nom du parlement et du siège du gouvernement à Copenhague. Créée par Adam Price et diffusée sur la chaine danoise DR1, elle arrive sur Arte ce jeudi 9 février à 20h35, dans la nouvelle case fiction de "la télé qui vous allume", nouvelle signature de la chaine culturelle.

Politique et femmes : l’alliance n’est pas nouvelle, et d’autres s’y sont cassés les dents bien avant (Commander in Chief et L’Etat de Grace en particulier, pour ne pas les citer). Par son talent d’écriture, la direction artistique, son ton mêlant rigueur et honnête, Borgen est une réussite et dépasse allègrement les exemples précédemment cités.

Contrairement à beaucoup d’autres films, romans ou séries se déroulant dans le milieu de la politique, Borgen se distingue d’abord par son idéalisme. Sans pour autant se teinter d’optimisme béat, la politique selon Borgen se veut engagée, honnête, pragmatique mais dans le bon sens : celui du peuple.

Une série positive

Adam Price, le créateur de la série revendique cette volonté : "Au Danemark nous avons la coutume très ancrée de penser qu’un politicien est malhonnête par nature. Avec Borgen nous avions envie de montrer que parfois ce n’est pas le cas. Qu’il existe encore des personnalités politiques dotées d’un bon cœur."

Ce sont plus précisément les personnages féminins (est-ce vraiment une coïncidence ?) qui se placent résolument du côté de l’idéalisme – alors que Kasper, Phillip, le mari de Birgitte, ou les autres ministres masculins sont souvent plus réservés et pessimistes.

Katrine, la jeune et brillante présentatrice, connaît tout au long de la série plusieurs revers personnels et professionnels, mais jamais elle ne déroge à son éthique de journaliste : la vérité, envers et contre tous – quitte à mettre en péril sa relation avec son chef ou son ex. Pour Adam Price, "elles ont des choix et des compromis à faire en permanence. Katrine en particulier n’est pas prête à accepter tous ces compromis en matière de journalisme, car elle est jeune et encore très idéaliste, mais elle reste influencée par les arrangements faits autour et au-dessus d’elle."

Birgitte, de son côté, se saisit avec détermination de la tâche qui lui incombe, et jamais ne renonce ou ne cède à de quelconques pressions pourtant nombreuses, tant du côté de sa famille, de son gouvernement ou de riches industriels. Elle se place par là totalement dans la lignée de Jed Bartlet, le président intègre de The West Wing.

Une actrice populaire et talentueuse

Pour incarner une femme au pouvoir, compétente et intègre, les créateurs de la série et la chaine de télévision danoise DR1 ont choisi une comédienne très connue au Danemark, Sidse Babett Knudsen. Selon Adam Price, il s’agissait de trouver "une femme dans la quarantaine qui soit aussi une excellente actrice pour assumer ce rôle".

Le choix d’une actrice aussi populaire apporte de manière assez judicieuse une sorte de légitimité supplémentaire pour les téléspectateurs danois, leur permettant ainsi de mieux s’identifier à cette dirigeante de fiction. En France, cette présence iconique / figure présidentielle pourrait s’incarner en la personne de Catherine Deneuve, Isabelle Huppert ou... Nathalie Baye.

Difficile en effet d’évoquer aujourd’hui Borgen sans mentionner l’autre série politique du moment, Les Hommes de l'Ombre, diffusée sur France 2 depuis le 25 janvier. Nathalie Baye y interprète Anne Visage, candidate aux élections présidentielles anticipées. Au-delà des similitudes de leurs héroïnes, outsiders dans un univers traditionnellement masculin, les deux séries s’attardent toutes deux sur la communication en politique, à travers les personnages de "spin-doctors" (conseillers en communication).
Une différence de taille intervient cependant dans le traitement : tandis que la série de France 2 se veut apolitique, et se place clairement dans la fiction dès son introduction (l’attentat mortel contre le président en exercice), la série danoise présente une vision de la politique bien plus réaliste et nuancée : "Évidemment, l’extrême droite a accusé la série d’être trop 'rouge', et l’extrême gauche nous a accusé d’être trop libéraux ! Nous essayons de rester au milieu." Sans s’inspirer clairement de faits réels, Adam Price admet bien volontiers que son équipe mélange plusieurs affaires existantes pour en tirer les intrigues de ces épisodes.

« Nous avons augmenté l’intérêt des Danois pour la politique,
et nous en sommes très fiers »
(Adam Price)

Borgen est une série qui se veut militante, et aborde des questions importantes au sein de la société danoise : l’alliance avec les Etats-Unis, l’autonomie du Groenland, l’immigration… Alors que Les Hommes de l'Ombre se contente de se saisir du problème de l’insécurité comme d’un thème de campagne, Borgen traite ces sujets en profondeur et sans complaisance.  

Les communicants en ligne de mire

Là où la série est sans doute la plus explicitement engagée,  c’est à propos des spin-doctors, qu’Adam Price n’hésite pas à dénoncer comme une conséquence majeure de la "professionnalisation de la politique" : "Je voulais être aussi honnête que possible concernant les relations entre la presse et le pouvoir. Quand on lit le journal ou qu’on regarde les actualités, on ne voit pas les tractations secrètes qu’il a eu entre le journaliste et le spin-doctor de tel ou tel politicien ; pour nous, l’idée était donc d’ouvrir la porte et dire : voyez."

Les créateurs des Hommes de l'Ombre se veulent bien plus neutres sur le sujet, en se contentant de constater l’importance réelle qu’a prise la communication dans la politique moderne. Le co-scénariste de la série, Régis Lefebvre est lui-même l’ancien chef de cabinet de François Bayrou, et de Philippe Douste-Blazy, et si son métier n’est pas épargné dans la série par les querelles de pouvoir et les scandales, son poste est finalement présenté comme le seul moyen pour les candidats d’accéder aux plus hautes marches du pouvoir.

Borgen et Les Hommes de l'Ombre n’appartiennent finalement pas au même genre. La première est une série politique : au même titre que The West Wing, elle s’attache à suivre un cabinet politique, son staff et ses opposants, sur le long terme. On peut lui reprocher l’absence de fil rouge dans l’intrigue, il n’en reste pas moins que chaque épisode est un modèle de débats et de questionnements politiques.

A l’inverse, la série de France 2 n’est pas réellement politique : il s’agit plutôt d’un thriller situé dans le milieu de la politique, comme avant elle Reporters, State of Play ou encore 24. C’est un milieu fascinant, complexe et dramatique au possible, mais le combat fratricide entre les 2 communicants aurait très bien pu se dérouler dans le milieu du journalisme ou en entreprise. La série danoise commence d’ailleurs là où la série française se termine, lors de l’élection : le plus important commence alors.

A noter que Lemonde.fr met en ligne jusqu'à jeudi de larges extraits, en français, de Borgen.

Oriane Hurard


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INFORMATIONS
Date : 06/02/2012 à 17:55
Auteur :
Tags : borgen serie politique diffusion arte
Fiche série : Borgen

Catégorie : Annonce
Sous-Catégorie : Preview



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