Pourquoi Heroes est une mauvaise série

Publiée le 27/11/2008 à 23:19
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Ici, chez Spin-Off, certains ont décidé d'arrêter de regarder Heroes, et depuis quelques épisodes déjà. Et je crois savoir qu'aucun n'a l'intention de reprendre. Pourtant, lorsqu'on leur demande, ils ont tous apprécié la saison 1. Je prends la série différemment. Comme une comédie. C'est ce que j'ai ressenti, tellement Heroes fait peu cas de la vraisemblance, du suspense et d'une réalisation soignée.

Hier, c'en était risible. J'ai pensé à mes collègues, qui détestaient se show pour tellement de raisons... Et les pensées de Sylar qui assènent, comme un coup de poignard dans le coeur des fanboys dans cet épisode 10 : "I hate Heroes". Je n'ai pas pu me retenir. Cette espèce d'orgasme interne quand il l'a dit. Il était la voix de son maître, de celui qui était à l'origine de tout, bref son showrunner, Tim Kring. Celui qui ne fait plus rien pour rendre la série intéressante, tellement il semble s'en foutre royalement. Et ce n'est pas moi qui le dit :
"I was primarily fascinated by the origin story. Once the original story is over, and the character has no more questions about what's happening or existential drama, then the questions become just about plot, and then it becomes harder for me personally to connect to."Sans compter que Tim Kring, en roi de la communication qu'il est, n'hésite pas à insulter les fanboys justement, qui regardent la série en live sur NBC, plutôt que sur Internet sans les pubs. De manière moins effective donc. Il est plutôt doué en communication avec la chaîne, non ?

Et puis, tu as de la chance Tim, parce qu'il ne se passe rien de bien folichon le lundi soir à cette heure là. Imaginez qu'Heroes soit diffusé le mardi soir, en concurrence de House, M.D. et Fringe. Mais il se ferait lyncher par son network le petit Tim.
"No one cares more about the fans than we do at Heroes, and no one appreciates them more than me. We are grateful for whatever way people are finding our show. Now more than ever."
Tu as raison Tim, essaye de sauver ta peau tant qu'il est temps. Vu le peu d'amis et de téléspectateurs qu'il te reste.

Après avoir congédié deux de ses collaborateurs, producteurs scénaristes de la série, il s'est même excusé d'avoir mal géré la crise Heroes. Et le voilà qui annonce épurer les intrigues et se concentrer plus sur les personnages. Une réduction d'effectifs (en terme d'acteurs) serait même à prévoir dans cette saison. Bryan Fuller, scénariste de la saison 1 et parti à la fin de celle-ci pour superviser Pushing Daisies, pourrait revenir aux commandes des scénarios. Sa série a en effet été annulée par ABC. Bonne ou mauvaise nouvelle ? A vous de voir. Moi je reste sceptique, au vu de cet ersatz d'Amélie Poulain vraiment ennuyeux.

Quant aux storylines, multipliées entre la saison 1 et la saison 3, elles n'apportent que du réchauffé. Le genre de plat qu'on a mangé il y a 2 semaines, qui est encore mangeable (à peine) et qu'on ingère parce qu'on est trop paresseux pour aller faire des courses. Et bien, ici, c'est pareil. Les histoires sont d'une banalité affligeante et même les storylines personnelles sont peu ragoutantes car elles partent dans tous les sens et ne font pas vraiment avancer l'intrigue principale. Comme la quête japonaise de Hiro. C'était lent, sans aucun intérêt pour l'intrigue principale et d'une naïveté sans nom. Si le personnage de Hiro était d'une drôlerie clownesque dans la première saison, il est vite devenu redondant dans sa façon de penser et d'agir, et son expédition dans le Japon médiéval n'a pas arrangé les choses. Et le faire régresser à l'âge de dix ans ne rendra pas son personnage plus charismatique.

Pire encore, certains personnages ne sont mis en place que pour combler le vide de l'imagination des scénaristes. C'est le cas de Maya, Adam Monroe, le terroriste irlandais et la black serveuse (la cousine de Micah, qui a disparu d'ailleurs) qui pouvait faire tout ce qu'elle voyait. Ce sont des personnages issus de la saison 2, celle qui, pour Tim Kring était la saison intermédiaire. Tous ces personnages sont arrivés comme un cheveu sur la soupe et sont repartis en un coup de cuillère à pot (de soupe). Leur storyline n'avait aucun lien avec l'intrigue principale et ne servait qu'à combler les blancs. A l'exception d'Adam Monroe, qui a littéralement fondu devant Arthur Petrelli dans la saison 3.

Un personnage puissant disparaît au profit d'un autre. Mais là où le bas blesse, c'est que Arthur Petrelli n'impose aucune crainte, aucun effet succinct d'angoisse ou de peur. Bref, je ne ressens rien en le voyant. Tout omnipotent qu'il est, il ne me semble pas réel. On ne connaît pas assez son passif et il est bien de trop puissant pour vraiment susciter de l'intérêt. Comprenez moi bien. Si le méchant et le gentil cohabitent (pour reprendre le cri d'amour du crapaud) dans une même sphère de pouvoirs, où les deux sont presque identiques, une sorte de ying et yang, alors on entrevoit un espoir que le mal disparaisse. Mais là, il semble invulnérable, rien ne peut le toucher, pas même des sentiments. La ressemblance entre Heroes et Prison Break est frappante. Les deux séries s'essoufflent en matière d'innovation créatrice et les morts revivent très fréquemment avec des explications pas toujours plausibles. Qui plus est, on sait que Peter récupérera son pouvoir, mais la question de savoir comment n'exalte pas non plus, tant la fin est évidente.

Le show de Tim Kring est devenu une présentation de multiples personnages auxquels on ne parvient pas à s'attacher. Leur nombre étant trop imposant, les scénaristes ne peuvent développer leurs angoisses, leurs craintes, leurs secrets et leurs amours.

Certains sites ont pris le parti d'annoncer que pour une série, tout retourner et ajouter une ambiguïté aux personnages sur leur motivation était un pari intéressant. Certes, mais un pari risqué. Lorsqu'on ne sait pas le faire on s'abstient. Du coup, les téléspectateurs ne savent plus à qui se fier, qui aimer, qui détester. C'est devenu très, trop compliqué de suivre. Pour une série sur des héros avec des pouvoirs, c'est quand même un comble. Et avec 4 millions de dollars par épisode, c'est du gâchis.

Valentin Morisseau



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